Cet ensemble de dispositifs cinétiques s’inspire des mutoscopes - ces machines du pré-cinéma dans lesquelles la succession très rapide d'images fixées autour d'un axe donnait au spectateur l'illusion du mouvement....
Cet ensemble de dispositifs cinétiques s’inspire des mutoscopes - ces machines du pré-cinéma dans lesquelles la succession très rapide d'images fixées autour d'un axe donnait au spectateur l'illusion du mouvement. Ici les images, tirées d’une sélection de négatifs issus des archives de la société Pentacon, sont de différentes natures : aux vues des longues mains lisses et soigneusement manucurées des modèles qui manipulent le matériel à des fins d’illustration pour les modes d’emploi répondent les vues recadrées d’images de reportage mettant en évidence un foisonnement de micro-gestes qui reflètent l'organisation sociale de l’entreprise : les gestes précis des ouvrières sur les établis ou les chaînes de montage dialoguent avec ceux d’hommes en costume qui signent des contrats, accrochent des médailles, serrent d’autres mains, boivent du champagne russe, fument des cigares de cuba ou des cigarettes américaines lors de soirées qui ont l’air assez folles, dans des rituels bien rodés. Chaque display décline un type d’images suggérant les mécanismes à l’œuvre dans cette organisation : vitrine officielle, travail des « masses » et « dessous du régime ». Si l’ensemble montre le langage des corps en soulignant le temps et l’énergie collective qu’il a fallu déployer pour concevoir, mettre au point, et assembler méticuleusement les modèles sortis de l’usine et en assurer la commercialisation, l’appareil photo sert aussi de prétexte pour évoquer l’appareil d’état. Les images défilent dans un mouvement perpétuel teinté d'un comique de répétition, tandis que les différentes cadences des dispositifs et leurs moteurs génèrent cliquetis, ronflements et couinements évoquant l’activité de l’usine. Isabelle Le Minh