La Galerie Christophe Gaillard présente du 5 octobre au 9 novembre, la première exposition européenne en galerie depuis plus de 20 ans de Tetsumi Kudo.
Six ans après la rétrospective que lui consacra la Maison Rouge sous le commissariat d'Anne Tronche et vingt quatre ans après la dernière exposition dans une galerie européenne (Galerie du Génie), l'exposition présentera conjointement une vingtaine d'œuvres (objets, sculptures, dessins, peinture, et computer painting) retraçant ainsi la trajectoire de l'artiste de la fin des années 50 à celle des années 70.
Artiste inclassable dont le travail a parfois été rapproché de divers mouvements avant-gardistes tels Gutaï, les Nouveaux Réalistes, Fluxus... mais sans toutefois appartenir à aucunes d'elles, Tetsumi Kudo est venu s'installer en France en 1962. Avec le soutien de Jean-Jacques Lebel ("Pour conjurer l'esprit de catastrophe"), puis d'Alain Jouffroy ("Les objecteurs"), qui vont jouer un rôle déterminant dans la découverte puis la reconnaissance de son travail, Tetsumi Kudo va développer une œuvre absolument inclassable et unique.
Profondément marqué par le traumatisme d'Hiroshima, le développement des nouvelles technologies (biologie, informatique) et soucieux de penser l'homme à venir, ce que l'on pourrait appeler un post humanisme, Kudo au travers d'œuvres diverses à base de cocon-phallus-chrysalide, de cages, de fils, de boîtes... tend à rendre compte de la métamorphose de l'homme moderne au travers des notions de hasard, d'indétermination, de biologie, de sexe et de contrôle et par là, il interroge ce qui persiste de la liberté humaine dans notre société d'aujourd'hui : la place de l'inné, de l'acquis et celle du programmé. Il jette ainsi les bases de ce qu'il appellera "une nouvelle écologie".
A travers tous les relais de contrôle, de la boîte à la cage, des bons de caisse au jardin transistorisé, l'artiste a cherché à rendre compte de la métamorphose de l'homme moderne. Tel un narrateur ironique, Kudo, aux différentes étapes de sa démarche, traite de la survie bio-chimique du phénomène humain et envisage sa métamorphose organique. Si des têtes sont enfermées dans des cages, si des membres humains sont reliés à des plantes par des circuits électroniques, si des mains sont captives à perpétuité d'un aquarium, c'est que Kudo avec un raffinement pervers cultiva l?humour et la cruauté. Dans son monde, l'homme et la technologie ne sont pas en relation d'opposition. Élevés ensemble, ils donnent naissance à une nouvelle culture, désignée par ses soins comme "La nouvelle écologie". L'homme ancien a disparu du territoire imaginé par Kudo, en dépit des fleurs, des cigarettes ou des crucifix, derniers souvenirs d'une existence lointaine. Un nouveau monde s'instaure, un monde qui se souvient probablement de l'insupportable violence d'Hiroshima et qui, résolument, se pare de couleurs fluorescentes.
Anne tronche, commissaire de l'exposition à la Maison Rouge en 2007
À sa mort en 1990, Tetsumi Kudo laisse une œuvre à la fois grave, révoltée, pleine d'humour et de poésie qui est une référence aujourd'hui pour des artistes tels Paul McCarthy (qui l'a inclus dans son "musée personnel" en 2010) ou encore Mike Kelley.
A noter, après la rétrospective que le Walker Art Center à Minneapolis a consacré à l'artiste en 2008 et les deux expositions personnelles à la galerie Andrea Rosen, Tetsumi Kudo bénéficiera d'une grande rétrospective dans 3 musées au Japon, Osaka, Tokyo, et Aomori de Novembre 2013 à Juin 2014.